Et ce pour redéfinir leurs pratiques, s’orienter vers de nouveaux formats ? Qui plus est pour l’e-réputation ? C’est par ce constat (et d’autres) que j’ai introduit ma conférence au CNAM organisée par l’ADBS et l’INTD. Au-delà des slides de cette conférence, ce billet est l’occasion de lancer un (potentiel) débat sur le sujet, ou tout du moins de s’interroger un peu.
Les métiers de la veille, et spécifiquement pour l’e-réputation, sont en constante évolution : nouveaux territoires, nouveaux usages, nouveaux outils, formats, plates-formes, etc, etc. Depuis 1 ou 2 ans, et la démocratisation de la veille sur le web, il me semble que ces évolutions vont encore plus vite. Au risque de laisser certains veilleurs sur le bord de la route ?...
Dans cette conférence j’ai esquissé plusieurs constats que j’ai déjà détaillés sur le blog (l’e-réputation sous quatre prismes, et la veille comme un métier de super héros), et que j’aborderai en profondeur dans de futurs billets : la question de la « veille ordinaire » (i.e. de plus en plus de collaborateurs ont accès à l’information), celle des « big data », la séparation de plus en plus net entre une approche CRM et une approche managériale… Et surtout, cette distinction nécessaire : le veilleur n’est plus là pour produire des résultats, mais pour produire du sens. Sinon, il ne devient lui aussi qu’un outil…
Mais dans ce billet donc, c’est plutôt l’idée de la disparition de Google Reader comme une opportunité plus que comme une fin en soi que je souhaite rapidement détailler ensuite.
Voici donc tout d’abord ma présentation, et je vous invite à lire ce billet sur le blog de l’œil au carré pour avoir plus de détail quant à ce qui s’est dit lors de cette conférence.
La fin de Google Reader : le petit séisme beaucoup trop amplifié…
Quand Google a annoncé la fermeture de son agrégateur, certains veilleurs ont craint pour leur « survie » : mais comment va-t-on faire ?
Pourtant il existe de nombreux autres agrégateurs ! Pourtant d’autres sont en passe d’arriver !
Oui mais Google quoi : si l’on utilise déjà ses moteurs, ses outils de stockage de documents, sa boite mail, etc… Dur de passer à autre chose, non ? Surtout quand les autres outils ne sont pas Google Reader (fatalement)…
Bref, comme toujours souvent, le changement c’était mieux avant. Clairement, GG Reader est un bon
agrégateur (pas mon préféré, mais passons), plutôt stable, avec de nombreuses fonctionnalités, et j’en passe. Ok.
Mais sérieusement : est-ce les fonctionnalités de GG Reader qui « manquent aux autres agrégateurs », ou est-ce une pratique trop assidue (et généralement unique) de cet outil qui voilent les yeux des utilisateurs qui, comme lorsqu’ils utilisent un autre moteur que Google, trouvent que « ça ne fonctionne pas comme Google » ? Autrement dit, ce séisme lié à GG Reader n’est-il pas causé par un non-renouvellement des outils utilisés par les veilleurs, voire des pratiques ? Je comprends tout à fait la difficulté lorsqu’on a la tête dans le guidon de passer à autre chose, de tester de nouveaux outils ou de redéfinir en profondeur ses pratiques. Mais là le choix devient pressant : que feront les veilleurs quand Google supprimera les flux RSS de ses plates-formes ? Voire (pire !) proposera un outil de veille clé en main ?...
De plus, et au-delà des questions de rentabilité, les arguments de Google sont intéressants : la mort annoncée du flux RSS donc, la personnalisation accrue des résultats, des systèmes de recommandation de plus en plus sophistiqués, et (surtout) de nouveaux usages et de nouvelles formes de consommation de l’information (en ligne, voire tout court).
Nouvelles formes d’accès, de tri, de lecture, et globalement de consommation de l’information qui me font entrevoir la fermeture de Google Reader comme une opportunité pour le métier de vielleur, plus que comme une fin en soi. Qui plus est pour l’e-réputation.
La fin d’un outil. Le début de nouvelles pratiques ?
Plus que la fin d’un agrégateur, ou la fin des formats RSS ou ATOM (qui me semble plus que probable dans les années à venir), je vois ici une opportunité de redéfinir les pratiques de veille (et spécifiquement en e-réputation –comme je le dis dans les slides ci-dessus). Et cela car :
==> La fin de GG Reader a affolé de nombreux veilleurs-documentalistes, qui se sont (enfin ?) questionnés sur leurs pratiques en allant plus loin que l’outil ;
==> Je connais quelques agences qui ne vendent exclusivement que de la veille faite sur GG Reader (et cher en plus –oui, oui) ;
==> N’importe qui peut utiliser un flux RSS… « Oui mais l’analyse ? ». Et bien l’analyse c’est un spécialiste du métier qui la fera. Ou un « data scientist » ;
==> A trop se définir par la technique (ou son outil), on devient un presse bouton…
En somme, voici le coup de fouet qu’il fallait
Les alternatives sont nombreuses, je les cite rapidement dans les slides, et les égraine tout au long de ce blog depuis quelques temps. Mais plus que des alternatives, il me semble qu’il s’agit surtout de redéfinir son métier et sa place dans l’organisation : de collecteur-documentaliste à data analyste (aspect technique). De veilleur-analyste à manager-qualiticien de l’information. Plus précisément, cela suppose la prise en compte de certains points, la définition de nouvelles pratiques :
==> La recherche de nouveaux formats autres que RSS ou Atom (comme Json par exemple). Ou, a minima, la mise en place de traitement des flux allant plus loin qu’un simple agrégateur (Yahoo Pipes par exemple, mais rien ne garantit sa pérennité aussi) ;
==> Le passage de la surveillance à la captation : ne plus « attendre que les résultats remontent, puis les trier », mais bien définir préalablement les filtres de collectes puis aller directement capter les données par le biais des API (avec tout ce que cela implique) ;
==> Apprendre à travailler avec des codeurs/développeurs/informaticiens, et donc s’initier à certains langages (PhP ou XML par exemple). Et cela pour pouvoir développer ses propres outils, « dialoguer » avec les API, ou au mieux avec des développeurs…
==> Le développement de vraies stratégies de « recherche sociale » s’appuyant sur la curation
recommandation/prescription des internautes. Et ce, encore une fois, afin de produire du sens plus que des résultats.
Au final…
Je pourrais citer des arguments ou des solutions voire des « alternatives » (i.e. faisons du vieux avec du neuf) plus longuement. Mais contrairement à mon habitude, je ne vais pas vous noyer dans ce billet #youpi.
Sans prétention aucune, j’espère que ce billet va permettre un (mini) débat qui ira plus loin que le « comment remplace-t-on GG Reader ? » ou « mais comment va-t-on continuer à travailler sans Google (tout court) ? » (ce qui est assez inquiétant je trouve, mais peut-être suis-je le seul ?).
Voilà pour ce petit billet d’étonnement du jour, n’hésitez pas à me donner votre avis, ou à me questionner sur les slides de ma présentation.
Et pour vous, en quoi la fermeture de Google Reader va-t-elle modifier vos pratiques ? Comment envisagez-vous à plus long terme la veille (en e-réputation ou non) ?!