L’e-réputation est devenu un sujet courant sur le web : en 1 an, mon agrégateur a vu passé près de 300 articles sur le sujet ! Si vous aussi vous souhaitez vous positionner sur le sujet, voici (issu de ces articles) 5 approches à inclure nécessairement dans vos articles. Car, au final, quoi de mieux que faire comme tout le monde pour intéresser tout le monde ?...
Bien évidemment, si cet article se veut (un poil) ironique, il faut souligner que de nombreux articles sur l’e-réputation font avancer le schmilblick (de mon point de vue bien entendu, et vous les retrouvez en partie ici). La vulgarisation est nécessaire (mais pas forcément la simplification).
D’autres, par contre, ne font que ressasser les mêmes approches du sujet… A croire que pour parler d’e-réputation il faut prendre des angles similaires, ou plutôt s’appuyer sur des « théories » et des approches devenues presque dogmatiques avec le temps.
C’est donc à la lecture de certains de ces articles que m’est venu cet étonnement, que je partage rapidement avec vous aujourd’hui. Et ce afin de vous permettre de produire des articles dont la pertinence et l’originalité n’auront que peu d’intérêt face à la médiatisation qu’ils obtiendront.
L’approche du prêt-à-porter
Ou : ce qui est bon pour telle entreprise est bon pour les autres.
Sous-entendu : il y a des « tailles uniques » d’internautes (influenceurs, etc.) et de réputation dont Klout et Google sont les étalons de mesure.
Méthode : citez des cas de grandes entreprises qui ont eu à gérer des crises (car oui : l’e-réputation n’est qu’une question de crises), puis cherchez à monter en généralités afin que même votre grande tante puisse s’y retrouver. Ensuite, proposez un arsenal de bonnes astuces (en 5 ou 10 points si possibles) partant du principe que oui, chaque entreprise à la même réputation et doit donc s’habiller avec les mêmes stratégies pour atteindre le graal : « une bonne e-réputation » (évitez de définir ce que vous entendez par « bonne » cela deviendrait trop complexe).
Verbatim à privilégier : « bonne pratique », « reproductible », « typique », « pour toutes les entreprises », « à faire » ou « à ne pas faire », « dans l’absolu », etc.
L’approche de la caméra de surveillance
Ou : vous devez surveiller tout ce qui se dit sur vous
Sous-entendu : c’est parce que vous ne surveillez pas que c’est arrivé. Et si vous surveilliez, alors c’est que la caméra était au mauvais endroit. Dans tous les cas : surveillez.
Méthode : soulignez tout d’abord que le web est grand, que tout le monde s’exprime, et que donc tout le monde peut parler de votre entreprise (en mal bien évidemment, cf crises). Faites ensuite remarquer que la réputation n’est pas une forme de transmission de perceptions, mais très basiquement ce que « les gens disent de vous sur les internets ». D’où l’idée de tout surveiller (le « tout » est important) car on peut toujours passer à côté d’un fameux signal faible que l’on aurait pu interpréter à temps. Concluez sans parler de stratégie de veille, mais en proposant les outils qui vont bien.
Verbatim à privilégier : « alertes Google », « exhaustivité », « photographie à l’instant T », « signal faible », « prédictions », « tendances », etc.
L’approche Darwin 2 .0
Ou : aujourd’hui, si vous n’êtes pas sur Internet, vous n’existez pas.
Sous-entendu : si votre entreprise n’a pas de page Facebook ou de compte Twitter elle est vouée à disparaitre du cycle économique, elle a raté une marche de l’évolution.
Méthode : commencez par citer des cas d’entreprises qui ont multiplié leurs bénéfices grâce à leur présence web. Puis, faites remarquer que le web est gratuit et simple d’accès donc pourquoi se priver d’ouvrir des comptes. Soulignez encore une fois que l’e-réputation est un risque et que pour y pallier « mieux vaut être présent afin que les internautes écoutent votre discours et pas celui des autres ». Rappelez subtilement que « votre réputation c’est Google », et que donc pour être sur Google il faut mettre du contenu sur le web. Concluez par « c’est en étant visible sur le web que le web vous rendra visible » (ou une formule proche soulignant au passage que c’est so 1.0 de n’avoir qu’un site web, et que non, ouvrir un compte sur Pinterest ou Quora est une nécessité, pas une mode).
Verbatim à privilégier : « (r)évolution », « nécessité », « visibilité », « tout le monde est sur Internet », « levier de performance », etc.
L’approche strass et paillettes
Ou : tout ce qui brille est e-réputation.
Sous-entendu : ce sont les résultats bien positionnés et positifs qui attirent l’attention et qui font la réputation.
Méthode : jouez sur les évidences : si c’est visible et que c’est négatif ( ?) alors c’est mauvais. Si c’est visible et que c’est louangeur, alors c’est bon. Mettez de côté la personnalisation des moteurs de recherche, l’influence du contexte, les interprétations possibles d’un même message, etc. Même la « théorie de l’horoscope » (fumeusement développer par moi-même sur Europe1 pour souligner que sur le web on cherche généralement à confirmer des idées préconçues) peut passer à la trappe. Non, l’e-réputation c’est paraitre bien dans tous les contextes, pour tout le monde. Et là, vous pouvez reboucler avec des stratégies prêt-à-porter.
Verbatim à privilégier : « positif », « première page de résultats », « visibilité », « contenu maîtrisé », « contrôler votre e-réputation », etc.
La (méta) approche du ravioli
Ou : dans l’e-réputation tout est bon, et tout est e-réputation (le SEO, le marketing web, la communication, etc.).
Sous-entendu : sous un enrobage que l’on peut cuisiner à toutes les sauces, l’on fourre tout est n’importe quoi.
Méthode : Présentez tout d’abord l’e-réputation non pas comme une finalité nécessitant un ensemble de moyens, mais comme un moyen amenant de nombreuses finalités. Choisissez ensuite une niche thématique (e-réputation et saucisson, e-réputation et danse tyrolienne, etc.). Si vous êtes très fort, vous pouvez même oser aborder des sujets ultra-médiatiques comme l’e-réputation de DSK (ben oui, imaginez un internaute qui tape son nom sans savoir qui il est) ! Démontrer très rapidement en quoi cela est une question d’e-réputation (à savoir : résultats visibles sur Google + adjectifs négatifs selon le Larousse 2012). Puis, proposez des solutions prêt-à-porter soulignant la nécessité de mettre des paillettes, des caméras de surveillance afin de ne pas rater l’évolution en cours.
Verbatim à privilégier : « e-réputation », « cyber réputation », « réputation numérique », « notoriété », « risques »… Et tous les termes qui de près ou de loin font 2.0 (car l’e-réputation englobe le web 2.0).
Au final…
La vulgarisation est une nécessité. Mais rendre accessible ne signifie pas pour autant rendre simpliste. Si nous (i.e. les personnes traitant du sujet de l’e-réputation) avons tous à un moment ou à un autre réduit ce concept (si concept il y a ?) à son plus simple appareil pour le rendre accessible, il faut à un moment ou à un autre prendre un peu plus de distance. Développer sa propre approche, poser des questions plus précises, inciter à la réflexion. Ne pas transformer l’e-réputation en solution miracle accessible à tous car cela n’est pas le cas dans la pratique.
Bref, normaliser les pratiques : oui. En faire un fourretout jouant sur les évidences afin d’attirer le lectorat (ou les clients) sera préjudiciable à l’avenir de mon point de vue.
Après, il est parfois difficile de développer un discours construit dans toutes les situations. Je parle notamment en connaissance de cause, ayant été interviewé plusieurs fois ces temps-ci et ayant dû réduire (beaucoup trop) mes propos pour les rendre accessibles (avec parfois un arrière-goût amère en relisant ou réécoutant ces dites interviews).
Vendre de l’e-réputation comme on vend des raviolis trouvera vite ses limites, ce n’est pas la première fois que cela m’étonne, et surement pas la dernière.
Et vous, quelles sont les simplifications qui vous étonnent (ou vous irritent) lorsque l’on parle d’e-réputation ? Comment, à votre avis, vulgariser sans dénaturer voire rendre faux ?!