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Notoriété, réputation, popularité, visibilité, autorité… Un ensemble de termes utilisés chaque jour pour qualifier la présence d’informations sur le web. Un ensemble de termes que
l’industrie de la (e)réputation emploie et essaye de quantifier. Seulement voilà : s’il est pertinent de parler de mesure de la notoriété, l’état actuel des technologies et méthodologies
fait qu’il est rare de voir des outils ou agences mesurer réellement la réputation. L’e-réputation reste à construire là ou l’e-notoriété est déjà clairement balisée ?
Il y a deux ans j’ai essayé de définir la réputation, la notoriété et l’image de marque, mais il ne parait pas inutile de revenir rapidement sur quelques « définitions » de ces concepts appliqués au web.
Car aujourd’hui, et nous le verrons plus loin, la magie des chiffres et de la data à foison sur le web fait que les outils et/ou méthodologies proposés aux entreprises se concentrent sur la notoriété (notion opératoire) plus que sur la réputation (notion qualitative et contextuelle).
Au-delà d’une simple remarque lexicologique il parait intéressant de souligner qu’évaluer la notoriété sur le web n’emprunte pas les mêmes mécanismes que l’évaluation de la réputation. Car l’un est plus simple que l’autre de par sa possible quantification, son absence de prise en compte du contexte et (surtout) le fait que la notoriété s’exprime là où la réputation s’interprète.
Notoriété et termes voisions : petites définitions appliquées au web
Ces « définitions » sont bien entendu schématiques et nécessiteraient pour chacune d’entre elles un billet voire plus. Elles se basent par ailleurs sur celles fournies par le TLFi.
La notoriété…appliquée au web
La notoriété est « le fait pour un produit, une marque ou un service d'être connu quel que soit le jugement porté sur lui. ». Nous sommes alors, en termes d’actions, dans le faire connaitre : buzz, spam, retweets, fans, etc. En termes d’analyse, évaluer la notoriété ne s’attache donc pas à l’opinion exprimée différenciant ainsi cette notion de celle de réputation.
De plus, la notoriété est une « notion opératoire, mesurée le plus souvent par un taux de population ayant connaissance d’un nom ou d’une marque. » (Beuscart, 2008). Appliquée au web donc, nous pouvons considérer que la notoriété est le pourcentage d’internautes présents sur une plateforme web donnée, ayant cité le nom d’un produit ou d’une marque. Et ce qui est intéressant sur le web, est le fait que l’exposition d’une population à un message nourrie la notoriété de celle-ci (récursion) : plus un internaute citera le nom d’une marque, plus les autres internautes seront exposés à cette marque.
La notoriété peut aussi être spontanée, associant le nom d’un produit/service à une marque. Sur le web, cette notoriété spontanée est clairement visible sur Google avec l’option « Recherches Associée » : pour un terme donné (par exemple soda) Google agrège les marques associées naturellement à ce terme (par exemple Coca) en fonction des recherches des internautes. Enfin, la notoriété peut être suggérée, dans Google l’option Suggest notamment, quand un individu reconnait le nom d’une marque après qu’on lui est proposé.
Au final donc, la notoriété sur le web consiste à mesurer la présence d’une organisation dans les discours des internautes. On peut se baser sur l’idée de recommandation sociale pour évaluer la notoriété suggérée (« je cherche le nom d’un produit qui »… « Tiens essaye ça »… « Ah oui, c’est ce que je cherchais »), ainsi que la spontanée (« qui peut me citer une bonne marque de parfum »… « moi, essaye ça »). On peut aussi se baser sur des algorithmes comme celui de Google, ou encore des outils de collecte de données pour tout simplement évaluer le volume de citations par internautes, et ensuite le comparer à l’ensemble des internautes présents sur le web ou un réseau. Ou (pour une comparaison plus fiable) aux concurrents et autres produits/services de l’organisation.
Bref, et nous le verrons plus loin, ce que généralement propose la majorité des outils dits « d’e-réputation »…
La visibilité… appliquée au web
La visibilité se définie comme le « fait de pouvoir être vu facilement, d'être aisément perçu dans sa structure, ses détails ». Appliquée au web cette notion se retrouve facilement sur les moteurs de recherche : ce que les internautes voient le plus facilement pour une requête donnée.
La visibilité est alors à la fois moteur de la notoriété (plus je suis vu, plus je suis connu) et dépend de celle-ci (plus je suis connu, plus je deviens visible). Là aussi, les possibilités de mesures et d’évaluations de la visibilité sur le web sont bien balisées : référencement naturel ou payant (en termes d’actions), positionnements sur un moteur ou sur une plateforme donnée, etc.
Audience, autorité et popularité
L’audience est le fait « d’écouter avec attention ou intérêt », « l’attention, intérêt accordé à quelqu’un ou quelque chose ». Appliquée au web, cette notion est aussi mesurable, notamment par les outils d’analyse d’une source : volume de visiteurs, temps passé sur le site, etc. Si l’audience peut impacter la visibilité sur le web (parce qu’elle entraine notamment le partage), elle est généralement la résultante de la notoriété : je suis notoirement connu, donc il est probable que l’on portera attention à ce que je dis.
L’autorité est le « pouvoir d’agir sur autrui ». Lorsque l’on parle d’autorité sur le web, on fait souvent référence à l’autorité cognitive (relation d’influence sur la pensée de quelqu’un) ou l’autorité de l’expertise liée à la crédibilité d’un individu ou d’une ressource (voir Broudoux). Pour schématiser, l’autorité est la pertinence, la crédibilité dans un domaine particulier que confère un individu à une source web, et in fine le fait que cette source devienne une référence (elle fait autorité) dans le domaine qu’elle traite. Sur le web, cette autorité peut se mesurer par les citations d’une source présentes dans d’autres sources, mais aussi l’impact global d’un discours sur ceux des internautes.
Cette autorité résulte de la visibilité, de la notoriété et de l’audience (se rapprochant alors de la notion d’expertise) bien que l’on puisse avoir une autorité sur un domaine au public réduit et donc jouir d’une faible notoriété. Et, de plus en plus, l’autorité jouera un rôle dans la visibilité des sources sur le web. En résumé, l’autorité (informationnelle) est un concept à manier avec des pincettes tant il se rapproche de la réputation qui, nous le verrons plus loin, repose sur des bases d’interprétation plus que de mesure exacte.
Enfin, la popularité est « la faveur du peuple, crédit dont dispose auprès du peuple, du plus grand nombre, une personne connue et appréciée par lui. ». La popularité s’évalue sur le web par le volume de liens entrants (entre autre), ou de fans/followers : plus on accorde de faveurs et de crédits à une source, plus on fait de liens vers elle, on s’abonne à elle ou on la cite. La popularité est la base de la visibilité sur les moteurs de recherche (Google en tête), elle nourrit l’autorité, et se repose généralement sur une notoriété déjà développée.
Au final, de la notoriété, de la visibilité et de l’audience qui sont des concepts facilement mesurables (car très opératoires) nous glissons petit à petit vers des notions plus qualitatives (autorité et popularité) pouvant s’appuyer sur des formes de mesures sur le web, mais dont une partie parait difficilement automatisable ou ne pouvant se reposer que sur la collecte de données.
La (e)réputation…
La réputation est « l’opinion favorable ou défavorable attachée à quelqu'un ou à quelque chose ». C’est une construction de l’esprit, basée sur le web sur les sources d’informations traitant d’un sujet (que ce soit les internautes eux-mêmes ou autre). Et l’opinion qui y est explicitement exprimée et que l’on s’approprie, ou qui est implicitement présente et que l’on interprète. Au final, il s’agit aussi d’une question de mémorisation et de restitution par les internautes de la raison/manière/façon dont est connu quelque chose ou quelqu’un (« le fait d'être connu pour » selon le TLFi).
Sans entrer dans plus de détail, la réputation sur le web se construit notamment par :
==> La notoriété : le fait d’être connu, cité par les internautes
==> La visibilité : le fait de rendre accessible au plus grand nombre des messages positifs ou négatifs
==> L’audience : l’intérêt qui sera porté à une information impactera plus ou moins fortement la perception que l’on aura par la suite de la réputation de quelqu’un ou quelque chose.
Et la réputation permet de construire :
==> La popularité : obtenir les faveurs d’un public dépend de la représentation que le public se fait de quelque chose ou quelqu’un
==> L’autorité : la réputation devient alors un levier permettant de construire son autorité dans un domaine précis.
Et l’influence ? Proche de la notion d’autorité, l’influence pourrait être vue comme l’impact des concepts présentés ci-dessus sur une prise de décision… Bien qu’à l’heure actuelle elle soit aussi (avec Klout ou autre) basée sur la seule notoriété : plus je suis cité, plus je suis influent (et j’ai un gros Klout).
E-réputation ou e-notoriété ?
Il est donc moins complexe de mesurer la notoriété sur le web (volume de données concernant un sujet, visibilité et audience qui en découle) que de mesurer la réputation (impliquant les sentiments, la construction d’une perception, etc.). Comme il est d’ailleurs aisé de définir ce qui entraine une forte notoriété (évènement, actualité) que de définir précisément les éléments informationnels permettant de construire une réputation (on touche ici à la notion de connaissances).
La réputation nécessite la prise en compte de nombreux éléments de contextes (propres au canal d’expression, aux attentes de l’organisation, à la finalité de cette réputation, etc.), il faut avoir un référent, là où la notoriété se concentre sur la comparaison d’éléments mesurables. Et cela, bien entendu, sans tenir compte de l’analyse des discours en eux-mêmes : il ne suffit pas de prendre en compte des adjectifs pour définir ce qui est bon ou mauvais, la preuve étant qu’un commentaire négatif peut avoir aussi un impact positif.
Pour résumer, la notoriété repose sur des données quantifiables, là où la réputation nécessite des interprétations fortement dépendantes des contextes et des capacités cognitives de chaque individu.
Des outils qui ne peuvent que mesurer la notoriété ?
Et dans notre société du chiffre, des sondages et de l’audience, difficile (voire impossible ?) de fournir à un commanditaire des informations non-chiffrées.
Il devient alors courant d’embrouiller les notions de réputation et de notoriété. Le simple fait d’être cité ne signifie pas pour autant avoir une réputation. Si l’une est dépendante de l’autre, il est péremptoire de dire que l’on peut évaluer la réputation car l’on peut mesurer la notoriété.
Un exemple : le baromètre e-réputation d’Image et Stratégie. Comme l’indiquent d’ailleurs ses auteurs, ce baromètre évalue la notoriété et non pas la réputation. Pourquoi ? Car il est difficile (j’oserais dire impossible) de définir un algorithme pouvant interpréter les perceptions d’un individu.
Cependant, dans l’acceptation commune, nous parlons maintenant d’e-réputation là où nous mesurons l’e-notoriété. De même pour l’influence donc, où les outils ne permettent pas d’évaluer les actions qui découlent d’un message, mais bien la notoriété de ce message ou de son émetteur. Je vous invite d’ailleurs à lire à ce sujet l’article : Et si on mesurait la notoriété plutôt que la popularité ?
Si nous sommes bien d’accord pour dire qu’évaluer la réputation repose sur une approche herméneutique nécessitant notamment une prise en compte du contexte et des différentes informations pouvant construire la perception qu’un individu aura sur un sujet, la mesure de la notoriété sur le web est loin d’être une science exacte. Elle est en effet dépendante de nombreux facteurs (plateformes et leurs API, puissance des algorithmes, sémantique, etc.) rendant alors difficile l’établissement d’une échelle stable.
Pour démontrer cela, pas besoin d’aller très loin : comparez les résultats de http://politivox.liberation.fr et de http://barometre.image-strategie.com. Ils varient sensiblement, et soulignent alors qu’avec des données similaires, les modes de collecte et de calcul impactent fortement l’interprétation possible des résultats…
Il est donc plus facile de mesurer la notoriété car on peut la chiffrer et la reporter à une échelle (approximativement) commune. Là où la réputation ne repose pas sur un cadre fixe et où sa commensuration dépend fortement d’une forme d’interprétation propre aux objectifs, aux attentes et aux références d’une organisation.
Au final…
Tout ça pour dire quoi ?
Et bien qu’au-delà de la simple irritation sémantique que l’emploi à tout va du terme e-réputation peut entrainer chez moi, les organisations ne doivent pas agir de la même manière en fonction de leur notoriété et de leur réputation.
Faire du buzz permet de développer sa notoriété. Activer la recommandation sociale, développer sa visibilité ou son audience aussi. Seulement, avoir une réputation en adéquation avec ses stratégies nécessite un travail plus long. Tout d’abord définir des cadres de référence afin d’interpréter au mieux les résultats. Ensuite, définir des indicateurs de mesure qui sont propres à l’organisation.
Ne plus passer (seulement) par des outils dont la forme de collecte et les statistiques générées sont transposables à d’autres organisations, qui donnent l’illusion que chaque réputation est comparable, que chaque internaute perçoit, mémorise et interprète un message de manière similaire.
Une fois cela intégré, libre aux organisations de décider si elles souhaitent se reposer et agir sur leur e-réputation…ou leur e-notoriété !
Et vous, quelle(s) différence(s) faites-vous entre ces deux concepts ? Quelle limite voyez-vous à la mesure de la notoriété sur le web ?!