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5 novembre 2012 1 05 /11 /novembre /2012 13:27

 

La-marque-face-aux-bad-buzz.jpegCrise, bad buzz… Les exemples sont nombreux sur le web, et relèvent souvent d’une appréhension trop rapide du terrain. En quoi la gestion de l’e-réputation influe-t-elle sur la communication de crise ? Et inversement ? Voici des pistes de réponses issues d’une interview donnée récemment pour le nouveau livre d’Antoine Dupin et Ronan Boussicaud.

 

Avant de restituer l’interview en elle-même, une rapide présentation de « Tout savoir sur... La marque face aux bad buzz » s’impose ! J’ai reçu ce livre ce week-end, et m’intéressant à la communication de crise depuis quelques années (au-delà du web) j’avoue que le point de vue de ces deux pros/blogueurs dont je lis chaque billet m’intéressait fortement.


Pas mal de bouquins sur le sujet sont souvent très (trop) pratiques (les approches en 10 points, etc.), ou ne font que lister des cas, et peu essayent de questionner les mécanismes en eux-mêmes et fournir de la matière à penser à leurs lecteurs, plutôt que de la matière à appliquer telle qu’elle (ce qui se relève souvent illusoire).

  Pour tout vous dire, le dernier livre m’ayant marqué sur le sujet est celui de Michelle Gabay « La nouvelle communication de crise »… sorti en 2001 (et que j’ai lu 2 ou 3 années plus tard)… Bref, ça faisait longtemps !

 

Et là, j’avoue avoir été assez surpris : le livre d’Antoine et Ronan est bien avancé sur le sujet. Certes, il manque certaines études ou définitions plus précises, en provenance de chercheurs, sur l’influence notamment (mais c’est un « biais » pour de nombreux pros, des chercheurs comme Watts par exemple étant en pointe mais jamais cités), mais là c’est juste pour souligner ce que j’aimerai lire 

Bien avancé, car les deux compères prennent le temps de détailler les termes ou concepts qu’ils manipulent, ils font références non seulement à des cas venant illustrer leurs propos, mais aussi à certains aspects hors-ligne de la communication ou du marketing, parfois ignorés dans certains livres « pure player ». De plus, le livre amène à réfléchir à une stratégie, plus qu’il ne donne des « bonnes recettes », ce que je prône depuis longtemps sur ce blog…


Enfin, ils ont su faire appel à d’autres pros dont les interviews méritent le détour, comme Cyroul, Grégory Pouy, etc. Bref, un livre à avoir pour mieux comprendre ce que communication de crise sur le web signifie, et à garder sous la main ensuite pour consolider ses stratégies.

En espérant que l’interview ci-dessous vous donne envoie d’y jeter un œil

 

 

La réputation numérique des entreprises est-elle née d'une nécessité ou d'un devoir ?

 

La réputation, en ligne ou non, a toujours existé. Le fait d’évaluer une entité, d’exprimer une opinion voire une opinion sur l’opinion, n’est pas né avec le web. Ce qui différencie principalement aujourd’hui la réputation sur le web de celle hors-web est que l’on peut voir, lire, appréhender les opinions exprimées.


Gérer sa réputation en tant qu’entreprise a donc toujours été une nécessité. Et cela l’est encore plus dans un environnement ultra-concurrentiel où la prise de décision du consommateur se fait dans un brouhaha d’informations, de commentaires, de données en tout genre. La nécessité de faire un choix passe donc par l’appui de certains marqueurs prescriptifs aujourd’hui clairement visibles sur le web : les like, tweets, notes, commentaires, etc. Marqueurs qui au final traduisent ce que les autres internautes « pensent » de l’entreprise ou de ce que les plates-formes web traduisent des activités des activités en ligne de ces entreprises.


Ne pas prendre en compte ces formes d’évaluations revient à avancer les yeux fermés dans un environnement numérique en constant changement. Au-delà de certains impacts clairement visibles sur le chiffre d’affaires par exemple, prendre en compte sa réputation en ligne permet de mieux saisir le contexte dans lequel l’entreprise va communiquer.

 

 

Quels sont les risques inhérents à la réputation numériques après une communication de crise ?


Après une communication de crise, les risques sont multiples. L’un des plus importants est de ne pas avoir répondu aux attentes de tous ses publics. En effet, la réputation n’est pas globale : chaque individu, chaque groupe aura une perception différente d’une même situation. Ne proposer qu’un seul message, ne pas s’appuyer sur les codes propres à chaque communauté/réseau que l’on souhaite cibler amène le risque de voir sa communication sans effet.


Ensuite, on ne maitrise pas sa communication. Les informations ou contenus diffusés ne vont pas s’arrêter aux cibles premières de la communication. C’est dans la reprise, la rediffusion à d’autres publics que ceux visés par la communication de crise qu’un risque potentiel peut apparaitre. Ce qui rassurera l’actionnaire pourra à l’inverse inquiéter un fournisseur. Ce qui répondra aux craintes d’une catégorie de clients  viendra peut-être perturber la perception d’une autre catégorie. Etre attentif au fait que la déformation du message inhérente à sa transmission et à son adaptation au contexte de chaque communauté n’est pas préjudiciable au discours global voulu par l’entreprise est nécessaire.


Enfin, une crise (d’un point de vue de la réputation) est un changement net de la perception qu’un groupe aura de l’entreprise.  Il est donc nécessaire d’une part d’identifier les différents groupes et la façon dont ils perçoivent ce qui est critique dans les actions ou les discours de l’entreprise. Et d’autre part de prendre en compte après la crise et la communication qui l’accompagne que le jugement que porteront ces groupes seront empreints de l’expérience qu’ils viennent de vivre ou dont ils ont eu l’écho.

 


Quels peuvent-être les effets secondaires d'une communication de crise sur la réputation numérique d'une entreprise ?


Les effets secondaires peuvent donc être une non-compréhension du message véhiculé par l’entreprise pour endiguer la crise par une partie de son public. Ainsi que la nécessité de réadapter son discours, de redéfinir les connaissances à partir desquelles les internautes vont juger les actions futures de l’entreprise, leurs points de repères. Car c’est là que le web joue un rôle intéressant : il mémorise et rend visible certains faits « historiques ». Ne pas prendre en compte ces faits par la suite, ne pas prendre conscience qu’au-delà de la mémoire des individus celle du web est existante, amène le risque d’être en décalage avec les attentes des internautes.

 


Quelles stratégies les entreprises peuvent-elles adopter afin d'améliorer leur e-réputation ?


Les stratégies se trouvent à plusieurs niveaux.


Niveaux 1 : le fonctionnement interne de l’entreprise. Si l’on vend un mauvais produit, si l’on a un service défectueux, ou encore un disfonctionnement récurant dans certains de ses process, alors très clairement les retours d’expérience des clients (ce que cherchent majoritairement les internautes avant d’acheter) ne pourra être que négatif. La réputation dépend des actions de l’entreprise, autant que celles-ci soient en adéquation avec l’image que l’entreprise souhaite renvoyer (fiabilité, écoute, réactivité, etc.).


Niveaux 2 : l’appréhension de l’environnement. Le web peut être vu comme un territoire de communication très particulier… Puisqu’il regroupe en lui-même de multiples territoires, avec des codes, des rites, des formes d’interactions bien particuliers. Vouloir s’exprimer sans prendre en compte les points de repères de l’internaute (ce sur quoi il se base pour évaluer le discours et les actions des entreprises) revient à prendre le risque de ne pas être compris, d’être en décalage. S’inspirer de l’existant, du contexte où l’on souhaite développer ses « valeurs » d’entreprise, est nécessaire pour instaurer un dialogue (la communication passant par la compréhension de l’autre, ici l’internaute).


Niveaux 3 : le développement de sa présence par la communication. Définir sa présence sur le web (quel message, sur quel plate-forme, avec quel régularité, quel public, etc.) est ensuite l’étape essentielle. Cela passe par une communication choisie en fonction des publics, la diffusion de contenus avec une réelle valeur ajoutée (ne pas faire une vidéo pour faire une vidéo par exemple), la mise en place d’espaces pour interagir avec le public si cela est nécessaire. Bref, le développement et la mise en place d’une réelle stratégie de communication prenant en compte les spécificités du web.


Niveaux 4 : le CRM. Enfin, si la réputation émerge des relations que l’on a avec son public, il parait nécessaire de définir la manière dont l’on va interagir avec ce public : de manière directe ? Sur un support développé par l’entreprise ? Par le biais d’un community manager ou directement avec les services de l’entreprise ? Une approche qui ne doit pas être une priorité mais une conséquence de l’observation de l’environnement aussi bien qu’une partie intégrante de la stratégie de communication.


Au final, chaque niveau doit ensuite interagir pour enrichir l’autre : le CRM doit impacter le fonctionnement de l’entreprise, l’environnement la communication, la communication le CRM, etc.


 

Penses-tu que les entreprises ont suffisamment intégrées ces différents niveaux dans leurs plans de crise ? 


Sans avoir une connaissance de tout ce qui se fait à ce niveau, par expérience je vois que les étapes de remise en question du fonctionnement interne et de connaissance de l’environnement sont trop souvent délaissées. Les entreprises ont tendance à créer des profils pour créer des profils, à embaucher un community manager pour entretenir ces dits-profils ou répondre de manière plus ou moins aléatoire aux internautes.


Cela peut marcher avec des entreprises qui ont un fort « capital marque » (et qui vendent du sucre ou du rêve par exemple). Pour le autres, bien souvent, le web se résume à un canal de communication de plus, et elles n’exploitent pas assez la richesse en termes de connaissances et d’informations dont le web recèle. Ce qui est dommage d’un point de vue du développement tout d’abord. Ensuite, cela amène souvent l’entreprise à changer continuellement son fusil d’épaule, à ne pas travailler sur le long terme mais en « mode campagne » avec plus ou moins le risque de voir apparaitre… une crise.

 

 

Une bonne réputation numérique met-elle à l'abri d'un bad-buzz ?


Non, puisqu’une réputation est mouvante et, comme je le soulignais plus haut, elle est différente en fonction des groupes voire des individus. Au mieux, la défaillance amenant la crise peut être perçue comme temporaire ou comme non-volontaire. Au pire, cela crée justement une forte déception puisque l’entreprise avait bonne réputation.



Le rôle de l' e-réputation se joue-t-il lors d'un contexte particulier ou d'un ensemble historique ?

 

L’e-réputation se constitue au fil du temps, des échanges, des discours et des actions de l’entreprise. L’e-réputation est un état de fait : à tel moment, dans tel contexte, pour tel public, pour tel produit/service/action de l’entreprise, les opinions et évaluations qui en sont faites sont celles-ci. C’est donc un ensemble historique qui prend du sens dans un contexte. Plus clairement : l’expérience que j’ai vécue avec cette entreprise prendra du sens lorsqu’un internaute se trouvera confronté à une expérience similaire. Le fait de partager mon expérience (ou la connaissance que j’ai en provenance d’un proche par exemple) pour répondre à une attente clairement identifiée n’aura pas le même impact que si je la partage hors-contexte.

 

L’e-réputation est un marqueur prescriptif jouant fortement dans l’établissement d’une relation (entre une entreprise et un client dans notre cas). Savoir mettre en avant tel ou tel marqueur au bon moment (ou essayer de le générer) est donc à définir en fonction des stratégies des entreprises.


 

Penses-tu que les entreprises ont suffisamment intégrées cette phase dans leurs plans de crise ?


Les entreprises semblent aujourd’hui chercher à identifier une e-réputation globale, qui appuierait leurs stratégies à tout moment, dans tous les contextes possibles, pour tous les publics. Encore une fois, définir le contexte dans lequel l’entreprise va s’exprimer ou agir, et dans lequel elle va être ensuite évaluée est essentiel. Cela est plus long, plus complexe, mais in fine beaucoup plus efficace sur le long terme. Car il serait illusoire de croire que le web va disparaitre comme il est apparu. Au-delà des effets de mode, des discours et recettes toutes faites, une approche plus artisanale me semble nécessaire.

 


Quels conseils donnerais-tu à des entreprises souhaitant améliorer leur réputation numérique ?


En termes de conseils, et pour ne pas être trop redondant avec les questions précédentes, je dirais qu’une mise à plat de ses stratégies (marketing, commerciales, communication, etc.) est une première étape incontournable. Dupliquer à l’identique ce qui se fait hors-web est généralement une erreur.

Ensuite, et à l’inverse, prendre en compte que chaque entreprise part avec un capital réputationnel acquis hors-web et que celui-ci va en partie conduire l’expression des opinions des internautes. Bref : aborder Internet comme un moyen de se reconnecter avec son public, de comprendre ce qui motive ses prises de position face à l’entreprise afin d’affiner au mieux les relations que l’on souhaite y développer.


 

Et vous, quels liens faites-vous entre e-réputation et communication de crise ?!

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