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12 septembre 2013 4 12 /09 /septembre /2013 14:04

 

 Marche-erep.gifSi aujourd’hui l’e-réputation cherche encore sa définition (ébauchée scientifiquement, et surtout très présente sur le web par le biais des professionnels), il est clair qu’elle a déjà trouvé son marché et les « business models » qui vont avec. Voici un article (mis à jour) publié dans Archimag il y a quelques mois, et qui revient synthétiquement sur des constats déjà proposés sur ce blog sur le marché de ‘e-réputation en France.

 

 

 

 

 

E-réputation : un objet commercial dès ses débuts

 

S’il fallait tracer rapidement l’histoire de la notion d’e-réputation, nous pourrions citer en premier lieu un article scientifique (McDonald et Slawson, 2000), dans lequel les auteurs mettent en avant la nécessité (sur E-bay) de prendre en compte les évaluations (la réputation en somme) des vendeurs afin d’établir des prix en adéquation avec les attentes des acheteurs. La nécessité d’évaluer, surveiller et gérer sa réputation en ligne revêt donc dès son apparition un aspect commercial…


En France, en 2006, le consultant/blogueur Christophe Deschamps parle lui de « l’indispensable gestion de la réputation numérique ». A la même époque, plusieurs agences spécialisées commencent à lancer leurs prestations de « veille d’opinion » (remplaçant parfois la veille-image déjà existante) et proposent des actions visant à gérer au mieux les avis, commentaires et évaluations produits en ligne par des internautes toujours plus libre de s’exprimer techniquement parlant (le fameux « web 2.0 »).


En parallèle à cela, les outils de veille stratégiques et éditeurs historiques du marché français introduisent peu à peu les plates-formes web à leurs prestations (blogs, forums, réseaux socionumériques, etc.) répondant ainsi à une demande croissante des agences et annonceurs. Suivant le marché anglo-saxon (Trackur, Radian6 par exemple), de nouveaux éditeurs apparaissent en France, proposant des outils de veille dédiés à cette thématique (Synthesio ou TrendyBuzz par exemple).


 

D’une approche artisanale… à une approche industrielle

 

Chemin faisant, l’e-réputation devient à partir de l’année 2010 un réel objet médiatique : presse écrite, radio, télévision, pas un média pour ne pas traiter des risques (souvent individuels) semblent-ils inhérents à l’e-réputation. Cet engouement pour le sujet (généralement présenté par le biais d’épiphénomène anxiogènes – « badbuzz » pour telle entreprise, perte d’un emploi pour telle autre personne), n’est bien entendu pas ignoré par de nombreuses agences web ou entrepreneurs en devenir. Sur ce blog, à tire d’exemple, nous avons par le biais d’une liste d’agences françaises dédiées au sujet, identifié ce phénomène d’accroissement des offres et prestations : d’une quinzaine fin 2008, nous en sommes à près de 180 en 2013 (et surement plus) ! L’éditeur Digimind soulignait d’ailleurs qu’en 2011 le marché de l’e-réputation (prestations et logiciels) représentait près de 190 millions d’euros


Mais comme pour tout marché, qui dit développement, dit normalisation des offres. Après des débuts que nous pourrions qualifiés d’artisanaux (au cas par cas, en fonction des moyens et des objectifs), sont apparues des pratiques « industrielles » : packages, intégration systématique d’une prestation de veille, community management, promesses de chiffres en termes de visibilité, SEO, recours juridiques… Jusqu’à l’apparition de prestation offshore (réalisées à Madagascar ou au Vietnam pour des prix défiant toute concurrence).  Bref, une réponse souvent dénuée de personnalisation permettant d’optimiser au mieux les « jours/hommes » des agences, et répondre ainsi à un besoin de croissance du chiffre d’affaire dans un marché de plus en plus saturé.


Ces approches sont par ailleurs appuyées par certaines « idéologies » fortement relayées par les dites agences, et consistant à résumer un concept aussi jeune que l’e-réputation (sur un support tout aussi jeune : le web) à quelques actions normalisées : gagner en visibilité sur Google (alors que la visibilité est résultante des mouvements d’opinion), nettoyer ou noyer les « mauvais résultats » (discutable d’un point de vue technique comme éthique), analyser les sentiments de manière binaire (positif ou négatif, comme si l’homme se résumait à une si faible complexité)… Le marché de l’e-réputation a ainsi réussit en peu de temps en France à développer ses propres normes, instituer ses propres pratiques et définir des « business models » en adéquation avec ses propres objectifs de croissance.

 

 

Vers une concentration du marché…

 

Au-delà d’une vision micro (le fonctionnement des prestataires) le marché de l’e-réputation peut être vu au niveau global. Et si nous le survolons, nous pouvons nous apercevoir que celui-ci ne déroge pas au fonctionnement d’autres marchés économiques du même type. Il s’agit tout d’abord d’un marché où : on échange de l’attention (celle des internautes), on monnaye de l’influence, l’innovation technologique (chez les éditeurs de logiciel –comme l’analyse automatique de textes) est un facteur fort de différenciation, la législation est en constante évolution pour s’adapter aux pratiques (comme les débats sur les faux commentaires)… Et où l’on peut observer une certaine concentration des acteurs.


Car le marché de l’e-réputation est à la base un marché où se rencontrent plusieurs types d’acteurs : les éditeurs de logiciels de veille, les agences web, de communication, de SEO, etc. Et qui, petit à petit, voit des acteurs dominants racheter les plus innovants ou les mieux placés afin d’offrir à leurs clients des offres intégrées à plus forte valeur ajoutée (et normalisées donc).


A titre d’exemple, au niveau de la veille, nous pouvons citer le rachat de l’éditeur Radian6 par le géant du CRM Salesforce. Nous pouvons aussi nous appuyer sur l’étude de Julien Pierre sur le groupe mondial de communication WPP, qui : possède des agences médias traditionnelles (pour gérer le discours hors-ligne), des éditeurs de logiciels, des entreprises de mesure d’audience (TNS Sofres), des agences web (community management , RP, comme Ogilvy) et des partenariats avec des acteurs dominants du web et inhérents à la « production » de l’e-réputation comme Google. En somme, un groupe pouvant créer, mesurer, gérer et influer sur l’e-réputation d’une organisation, et ce de manière totalement intégrée.


 

… à une bulle 2.0 ?


Cette forte concentration du marché, cette normalisation des pratiques souvent peu remise en question (et en évolution) amène à nous questionner sur le possible éclatement d’une « bulle 2.0 »… ou tout du moins d’une bulle de l’e-réputation !


En effet, qui nous dit que dans l’avenir, Google, Facebook ou Twitter (leviers principaux de la plupart des agences) ne vont pas développer leurs propres outils de surveillance et de mesure des conversations d’internautes ? Notons d’ailleurs que de plus en plus d’éditeurs de logiciels de veille en France sont en difficultés… Là où, à l'opposé, d'autres éditeurs lèvent de fortes sommes (ce qui questionne vraiment les modes de financiarisation et d'investissement dans le secteur).


Si de nombreux prestataires délèguent à l’heure actuelle la mesure de « l’influence » à un outil comme Klout, quelle sera leur valeur ajoutée le jour où les grands acteurs du web proposeront ce type de prestations ? Comment les plus petits prestataires ou les indépendants résisteront-ils face à des consortiums toujours plus gros et diversifiés ? Enfin, comme pour le webmastering il y a quelques années, ou la documentation dans des temps plus lointain, comment résisteront ces centaines de prestataires face à l’intégration de professionnels de l’e-réputation directement dans les services des annonceurs ?


Si certains se tournent de plus en plus vers les petites ou moyennes entreprises, il est à parier que le conseil stratégique issus de l’expérience, de la réflexion voire de la R&D permettront à certains de ces prestataires de tirer leur épingle du jeu. En attendant, espérons que les pratiques liées à l’e-réputation ne cessent d’évoluer pour permettre aux organisations de s’approprier pleinement un objet plus complexe qu’il n’y parait parfois…

 

 

Et vous, comment abordez-vous ce marché ? Quelles évolutions pour l’avenir ?!

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commentaires

@
Très intéressant cet article comme souvent. 2 remarques pour compléter. On peut parler marché de l'e-réputation pour faire référence à un besoin qui n'existait pas avant, et que de fait des acteurs<br /> se sont organisés pour y répondre. Mais du point de vue de la demande des entreprises, des marques ou de leurs dirigeants, c'est un peu différent. Ce besoin est rarement déconnecté du besoin de<br /> gérer sa réputation tout court, de travailler son image et au final vouloir accroître son influence sur ses parties prenantes et ses clients. De ce point de vue parler de l'e-répuation est une<br /> fiction qu'il n'est pas bon d'entretenir à mon avis parce qu'elle laisse entendre que le digital, le web social seraient un univers séparé du monde "réel". Seconde remarque l'e-réputation renvoie à<br /> deux types de pratiques assez différentes : celles qui consistent à profiter du digital pour installer des relations constructives avec tous ceux dont l'engagement ou la bienveillance est utile.<br /> Et, il y a de l'autre côté, quelque chose qui ressemble davantage à du CRM et parfois même du SAV. C'est là effectivement qu'il faut distinguer les approches artisanales, des méthodes<br /> industrielles... d'où des acteurs aux profils très différents qui ne partagent finalement que le mot e-réputation ! A bientôt.

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